Project a réuni plus de 1900 signatures au bas d’un manifeste rappelant à l’Europe ses engagements climatiques.
Une piqûre de rappel. Le think-tank The Shift Project, fondé par l’expert de la transition énergétique Jean-Marc Jancovici, a présenté, mardi 21 mars, un manifeste enjoignant aux gouvernements européens de maintenir leur vigilance sur les enjeux du climat : « Nous, signataires du présent manifeste pour décarboner l’Europe, appelons les Etats européens à lancer dès maintenant les politiques capables d’aboutir en 2050 à des émissions de gaz à effet de serre aussi proches que possible de zéro ! », débute le texte.
La vague verte a faibli
Quinze mois après l’Accord de Paris, le constat est sévère : la vague verte a faibli. Le changement climatique reste largement absent des débats de la campagne présidentielle en France. De son côté, le président américain, Donald Trump, a annoncé le 16 mars une coupe massive de 30 % dans le budget de l’Agence de protection de l’environnement.
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Le premier budget du président Trump sera détaillé dans la journée. Il n’a aucune chance d’être adopté en l’état par le Congrès.
Donald Trump a proposé, jeudi 16 mars, dans son premier budget, une baisse drastique des ressources allouées à la diplomatie et au climat, pour compenser une hausse spectaculaire des dépenses de défense. Ce budget n’a que très peu de chance d’être adopté en l’état par le Congrès. C’est ce dernier, et non la Maison Blanche, qui tient les cordons de la bourse.
« Mon boulot ne consiste pas à représenter le monde. Mon boulot consiste à représenter les Etats-Unis d’Amérique », avait prévenu Donald Trump au début du mois de mars, devant le Congrès. Le premier budget du président concrétise donc sans surprise cette ambition.
La hausse de 54 milliards de dollars prévue pour la défense (près de 10 %) et les dépenses allouées à la sécurisation de la frontière avec le Mexique s’accompagneront d’une baisse marquée des ressources de la plupart des autres ministères et agences fédérales. Donald Trump propose notamment :
- une baisse de 28 % des ressources du département d’Etat (ministère des affaires étrangères), chargé de la diplomatie de la première puissance mondiale ;
- une réduction spectaculaire, de 31 %, des fonds alloués à l’Agence de protection de l’environnement (EPA), en pointe dans la lutte contre le changement climatique. Son budget serait amputé de 2,6 milliards de dollars, en particulier en supprimant quelque 3 200 postes, soit environ un cinquième du total ;
- la fin de la participation américaine au Fonds vert de l’ONU pour le climat (Green Climate Fund) ;
- une réduction de 650 millions de dollars sur trois ans des contributions aux banques de développement, dont la Banque mondiale ;
- une réduction de la contribution aux Nations unies des Etats-Unis, qui ne contribueraient pas à « plus de 25 % des coûts des opérations de maintien de la paix » ;
- une baisse de 5,8 milliards de dollars du budget des centres nationaux de santé (National Institutes of Health, NIH) – a plus grosse institution gouvernementale chargée de la recherche médicale.
Depuis son arrivée au pouvoir, le 20 janvier, Donald Trump, qui a par le passé mis en doute la réalité du changement climatique, martèle sa volonté de supprimer nombre de réglementations fédérales sur l’environnement, qu’il juge inutiles, affirmant qu’elles sont un obstacle aux créations d’emplois.
Par ailleurs, le financement de nombre de programmes fédéraux, tels que le Fonds national pour les arts (National Endowment for the Arts), serait purement et simplement supprimé.
A ce stade, le manifeste est soutenu par plus 1 900 signataires, dont plus de 80 patrons français. Des industriels comme Xavier Huillard (Vinci), Jean-Bernard Lévy (EDF), Martin Bouygues ou Jean-Dominique Senard (Michelin) ; des financiers, François Pérol (BPCE), Nicolas Dufourcq (Bpifrance), ou encore Jean-Pierre Mustier (UniCredit) mais aussi des représentants du monde académique comme Jean Jouzel (CEA), Yves Bréchet (Haut-commissaire à l’énergie atomique) ou Gaël Giraud (Agence française de développement).
S’appuyer sur les entreprises
Si nombre d’ONG préfèrent éviter la collaboration des entreprises, The Shift Project a, au contraire, pris le parti de s’appuyer sur leur financement et leur expertise. « C’est un rappel de nos engagements de la COP21 dont le succès est largement lié à l’implication des entreprises », souligne Thierry Déau, PDG du fonds d’infrastructures Meridiam.
« Ce sont les entreprises qui vont mettre sur le marché des produits et services issus de l’innovation. Il n’existe pas de stratégie gagnante sur le long terme qui n’intègre pas le développement durable », ajoute Claire Dorland-Clauzel, membre du comité exécutif de Michelin, en charge notamment du développement durable.
Le choix de la transition énergétique
Les industriels embrassent la transition énergétique dans la perspective de conquérir de nouveaux marchés dans l’énergie, les transports ou l’agriculture. Mais ce virage s’opère aussi sous la pression des investisseurs.
« La question du développement durable nourrit un échange avec les entreprises dont nous sommes actionnaires, qui va bien au-delà du dividende. Nous avons un rôle d’impulsion », explique Antoine Lissowski, directeur général adjoint de CNP Assurances, gros intervenant sur les marchés financiers. « Nous avons, par exemple, vendu les actions d’une entreprise réticente à réduire son emprise sur le charbon thermique. »
« Aucun programme présidentiel en France, ni aucune politique mise en œuvre en Europe ou dans le monde n’est encore à la mesure de l’ambition de l’Accord de Paris : atteindre la neutralité carbone (zéro émissions nettes de gaz à effet de serre) dès que possible au cours de ce siècle », déplore le groupe de réflexion qui demande aux candidats à la présidence de la République de s’engager dans ce sens.
Source http://www.lemonde.fr/economie/article/2017/03/21/ sur-le-climat