L'assemblée internationale de l'OMS se tient habituellement chaque année à Genève.
AFP
Les représentants des 194 Etats membres se réunissent virtuellement à partir de lundi pour décider d'une réponse commune à la pandémie.
En plein tumulte, l'Organisation mondiale de la santé s'apprête à tenir sa 73e assemblée dans une configuration inédite. Cette réunion sera scrutée de toute part dans un contexte particulier. Ce rassemblement, normalement suivi par les experts en santé, prend en effet la lumière de façon inhabituelle.
Les 194 pays membres devraient répondre présents lundi pour une conférence virtuelle qui doit durer jusqu'au lendemain. Les enjeux sont énormes, alors que l'organisation onusienne est fortement critiquée pour sa gestion de la crise du coronavirus. Mais la tenue de la réunion montre aussi qu'elle ne recule pas devant un défi majeur : organiser une réponse internationale à la pandémie. L'Express revient trois questions sur les enjeux de cette assemblée.
- Un consensus est-il possible ?
C'est le principal défi de cette réunion aux caractéristiques inédites. Le texte de six pages et 54 paragraphes, initié par l'Union européenne et largement porté par la France, a déjà reçu le soutien de 122 pays. Le premier jet a été rédigé par l'Allemagne, la France et la Finlande. Début mai, l'Union européenne en a déjà adopté les contours, mais également neufs autres Etats, dont l'Australie, le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande, précise Le Monde. Des pays majeurs figurent parmi la centaine de pays déjà engagés dans cette résolution : la Russie, le Japon, l'Inde ou encore le Canada. Le texte prévoit un processus d'évaluation de la riposte sanitaire internationale, une coopération avec les organisations compétentes pour identifier la source du virus et un accès universel aux médicaments, dont le vaccin.
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"Cette crise doit aussi être l'occasion de réinventer l'OMS en la rendant plus forte et plus indépendante, dotée d'instruments pour faire appliquer ses résolutions", souligne auprès du quotidien German Velasquez, conseiller spécial sur la politique de santé au South Centre, une organisation intergouvernementale des pays en développement. Mais l'OMS compte 194 Etats membres et le chemin est encore loin d'être fait. "Ce pourrait être la première page du livre du monde d'après", assure au JDD l'un des négociateurs de la résolution.
Sauf que depuis le début de l'épidémie, chaque Etat en a souvent fait qu'à sa tête. "Faire circuler l'information est essentiel, et c'est un défi. Il faut faire travailler 194 États membres ensemble et il faut bien quelqu'un pour remplir ce rôle. L'OMS est la seule organisation de santé à vocation universelle", souligne auprès de RFI du centre de recherches sociologique et politique de l'Université Paris 8.
- L'OMS sera-t-elle jugée sur son action ?
L'assemblée de l'OMS aurait pu servir de tribunal ouvert pour juger ses actions pendant l'épidémie de coronavirus. Mais si les Etats-Unis poussent pour qu'une enquête soit menée rapidement aussi bien en Chine que sur le fonctionnement de l'organisation onusienne, elle ne devrait pas avoir lieu qu'une fois l'épidémie passée, explique Le Monde.
La résolution étudiée à partir de lundi propose en effet "d'initier au plus tôt possible, et en concertation avec les Etats membres, une évaluation progressive, impartiale, indépendante et complète pour passer en revue les expériences et les leçons tirées de la réponse internationale à la pandémie de Covid-19, telle qu'elle a été coordonnée par l'OMS". Le procès de l'OMS ne devrait donc pas se faire virtuellement lundi.
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La réponse à la pandémie de coronavirus reste le premier problème urgent à régler. Mais les Etats-Unis pourraient venir jouer les fauteurs de troubles. "La principale inconnue de cet événement sera la réaction des Etats-Unis", relève Mukesh Kapila, un ancien conseiller du précédent directeur général de l'OMS auprès de NBC News. "Ils pourraient utiliser cette assemblée pour réitérer ses attaques contre la Chine et, bien sûr, les dirigeants de l'OMS", ajoute-t-il.
- Pourquoi la question du vaccin sera-t-elle centrale ?
Depuis l'apparition du coronavirus en Chine, puis sa propagation sur les autres continents, les laboratoires du monde entier se sont lancés dans une course effrénée pour trouver un traitement et un vaccin. Au total, 102 vaccins sont actuellement en phase de développement dans le monde, comme le relève Le Temps. Parmi ces vaccins, huit sont déjà rentrés dans des phases d'essais précliniques et deux sont même en phase 2.
Le projet de résolution qui doit être étudié par les Etats membres demande un "accès universel et équitable et une distribution juste de toutes les technologies et produits sanitaires essentiels de qualité, sûrs, efficaces et abordables". En témoigne la dernière polémique chez Sanofi, où son directeur général a annoncé que les Etats-Unis seraient les premiers à bénéficier d'un vaccin lorsqu'il serait mis au point par le groupe pharmaceutique, avant de rétropédaler.
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"Nous n'avons pas beaucoup de choix. Le monde recense cinq grandes firmes pharmaceutiques, quelque 60 usines pouvant produire des médicaments et vaccins", souligne le directeur de l'Institut de santé globale de l'Université de Genève, Antoine Flahault auprès du Temps. Mais encore une fois, les Etats-Unis devraient donner du fil à retordre à l'OMS. Ces derniers auraient fait pression pour que la mention du vaccin et la demande d'un accès universel soit enlevé, explique le JDD. "Il y a une marge d'incertitude sur ce que les Américains décideront d'ici à mardi, Trump pourrait en profiter pour sortir de l'OMS, espérons que ce ne sera pas le cas", confie un expert au journal.