La Mauritanie aura 60 ans dans un an et c’est l’âge de la maturité et du passage du témoin. Ce sera aussi souhaitable que ce soit l’année de la Réconciliation Nationale qu’il faudra préparer une année durant sans précipitation et sans passion mais avec ouverture d’esprit, tolérance et équité.
Pour cela l’Etat mauritanien, ni ses institutions ne peuvent être tenus responsables de tous les fractures sociales passées et actuelles et ce pour plusieurs raisons :
- L’esclavage et ses séquelles ont existé avant l'indépendance de la Mauritanie,
- Les évènements des années soixante et soixante-dix étaient liées à des questions d’enseignement et de politique internationale,
- Les évènements de 89 s’étaient déroulés sur deux territoires : le Sénégal et la Mauritanie et étaient en grande partie l’œuvre de citoyens de deux pays. Nous ne pouvons oublier qu'il y a eu des meurtres, des viols, des exécutions extrajudiciaires de civils sur les deux rives du fleuve Sénégal. Des militaires furent aussi à déplorer comme victime, situation difficile et inconcevable pour des frères d'armes qui avaient fait la guerre du Sahara ensemble pour certains. Il ne faudra cependant avec tolérance ne pas faire d'amalgame entre individus et institution. La situation sécuritaire du pays depuis 1975 ne doit pas nous faire oublier que cette institution est la seule garante de notre sécurité voire même de notre existence comme nation. Et pour préserver notre nation et notre identité nous ne pouvons qu'œuvre afin qu'elle continue à assurer notre sécurité. Car sans sécurité il n’y a pas de paix et sans paix il n’y a point de développement. Cependant des choses sont à changer pour que la réconciliation et le pardon perdurent.
Notre situation est très différente de celles malheureusement vécues par des pays comme l’Afrique du Sud, le Rwanda, la Sierra Leone, la côte d’Ivoire, les Balkans ou l’Allemagne nazie.
Pour les raisons énumérées ci-dessus, il n'est plus possible de revenir à un "Tribunal International" du type "Nuremberg" ou "TPI", ou à une Conférence "Vérité/Réconciliation en Afrique du Sud" ou à des tribunaux "Gacaga" au Rwanda.
Par contre et dans des cas exceptionnels, l’Etat mauritanien avait fait preuve de sagesse et autorité en demandant parfois l'avis de nos Oulémas/Imams pour des questions épineuses et celles-ci en font partie.
Dans ce cas précis, il peut mettre en place une "Commission Nationale de Réconciliation (CNR)" qui sera présidée par l'un de nos illustres Oulémas et qui comprendra une commission représentative des oulémas de toutes nos communautés et incluant aussi des leaders issus de toutes nos communautés (en y ajoutant même la diaspora, les juges, les avocats, la société civile et les représentants des partis politiques).
Cette CNR sera habilitée à étudier tous les cas liés aux séquelles de l'Esclavage, aux événements 89 au Sénégal et en Mauritanie, aux droits de l’homme, aux accès plus équitable aux droits/ressources/emplois, au droit à tout enfant de parent mauritanien d’être inscrit au registre de l’Etat civil. Ensuite elle travaillera à la proposition de solutions pour régler définitivement ces questions.
Elle pourra éventuellement mettre en place Un comité régional de Réconciliation (CRR) dans chaque Wilaya et faire ainsi remonter les informations et propositions de résolution à la Commission Nationale.
Ainsi les cas seront classés et des solutions seront proposées au niveau local et remontés au niveau national.
La Commission Nationale de Réconciliation (CNR) peut agir par priorité. Ainsi pour les questions sensibles comme l’esclavage, les évènements de 89 ou de droits humains, il pourra écouter avec toutes les garanties de confidentialités (secret des lieux, des personnes, des noms, utilisations de numéros de téléphones verts) pour entendre les plaintes, les témoignages, les repentirs, les suggestions de toute personne volontaire en lui garantissant la sécurité et l’immunité.
Après 8 mois dédiés aux travaux, la CNR aura 3 mois pour dresser un état des situations et proposer des solutions au niveau local et national. L'Etat pourra ainsi à partir de ses travaux faire les assises de la Réconciliation Nationale au sein de l'Assemblée Nationale et ainsi légiférer avec l'appui des élus et de la population.
La Commission Nationale de Réconciliation (CNR) continuera d'exister afin de poursuivre le suivi des décisions prise et pourra ainsi continuer de jouer son rôle de médiation avec un nouveau rôle de Médiateur de la République.
La Commission Nationale de Réconciliation (CNR) se portera garant en veillant à ce que l’honneur et la dignité de chaque citoyen, de chaque famille et de chaque groupe ou communauté seront préservés.
L’Honneur de l’individu pourra ainsi être préservé, les morts ont besoin d’être recensés, leur sépulture dressée afin de recevoir la visite de leurs proches. Leurs biens spoliés recensés et des réparations faites.
L’honneur de sa famille préservée avec des réparations et les excuses de la CNR pour tous les préjudices subis et l'engagement de veiller à l'accès des orphelins à tous leurs droits.
Le Conseil National pourra également proposer des mémoriaux. Un mémorial de l’esclavage, un mémorial des évènements de 89, un mémorial de la diversité culturelle et ethnique.
La CNR pourra ainsi travailler avec l'Etat pour le paiement rapide des retraites et droits. Des réparations ou prises en charges médicales (CNAM) peuvent être ainsi assurées par l'Etat sur proposition de la CNR.
Pour la fraternité et en se basant sur les principes de l’islam (fraternité, justice, égalité, voisinage, partage), il peut également préconiser des équilibres pour permettre aux citoyens d’avoir les mêmes accès aux même infrastructures.
Pour plus de Répartition de riches nationales et surtout pour atténuer cette question d’accaparement de richesses et des terres par une élite de plus en plus dominante, la Commission Nationale de Réconciliation (CNR) pourra travailler à une organisation plus formalisée de la collecte et de la redistribution de la Zekat, proposant ainsi les bases d'un Système Islamique de Protection Sociale.
La Commission Nationale de Réconciliation (CNR) pourra également travailler à diminuer les aspects néfastes du communautarisme et cette nouvelle religion qu’on appelle l’intervention ou Wassata en instituant le mérite et les compétences/capacités comme seuls critères de sélection dans les concours.
Les méfaits du communautarisme de domination sont le favoritisme aveugle et l’injustice, le sentiment d'impunité à cause de réseaux d’influence, d’argent ou tribaux. Il pourra, si on n'y prête attention, être l'une des principales sources de conflits sociaux futurs qu'il faudra atténuer en encadrant le communautarisme à ces principaux avantages sociaux qu'il procure et en l'éloignant de la Wasata ou favoritisme.
Les ONG et citoyens peuvent aussi y contribuent en investissant dans l’accès à l’éducation des enfants pauvres dans leur milieu ou voisinage (parrainer l’éducation d’un enfant d’une famille pauvre de leur voisinage ou communauté par l’achat de fournitures, de lampes solaires, de dons d’habits, de nourriture et la prise en charge de ses soins médicaux).
La CNR pourra également animer des conférences sur tout le territoire sur le voisinage, le bien d’autrui, le droit du musulman et du citoyen, la concorde nationale et aussi les suggérer lors des prêches du vendredi et durant le mois saint du Ramadan.
La fin de ses travaux sera sanctionnée pas des Assises de la Réconciliation Nationale et par la diffusion d'un livre de ses travaux.
Ethmane BA, Tél 48860388