Les Etats ont validé le rapport choc du Giec sur le climat

sam, 06/10/2018 - 15:25

Depuis une semaine, les gouvernements de 126 pays se réunissaient à huit clos pour décider de l'avenir de la planète. Au sens propre. Ils ont approuvé ce samedi 6 octobre, après d'âpres négociations, le nouveau rapport du Giec sur le réchauffement climatique. Celui-ci doit être dévoile dans la nuit de dimanche à lundi.

Ce bilan, réalisé par des centaines de spécialistes et se basant sur 6000 études scientifiques, fait état du consensus actuel sur le réchauffement climatique et, surtout, sur l'impact d'un réchauffement à 1,5°C et la possibilité pour la société de réussir à ne pas dépasser ce seuil.

Ce rapport avait été commandé spécialement lors de la COP21, afin que les Etats signataires de l'accord de Paris sachent les contraintes nécessaires pour atteindre leur objectif et les risques en cas d'échec. Car le précédent rapport du Giec n'avait pas spécialement travaillé sur l'hypothèse des 1,5°C et le prochain n'est pas prévu avant 2021. Le tableau, s'il brosse tout de même un peu d'espoir, est clairement sombre.

Risques et espoirs

Dans leur rapport, les scientifiques décrivent les impacts d'un réchauffement de +1,5°C, un niveau que la Terre pourrait atteindre dès 2030 (2030-2052) faute de réduction massive des émissions de gaz à effet de serre.

Une douche froide pour la communauté internationale, qui avec l'accord de Paris s'est prononcée pour rester "bien en-deça de 2°C" et si possible 1,5°, mais dont les engagements pour réduire les émissions de gaz a effet de serre poussent le mercure vers +3°C.

Les risques se trouvent réduits à +1,5°C, par rapport à +2°C, qu'il s'agisse du nombre d'événements extrêmes, de vagues de chaleur dans le monde entier, de précipitations diluviennes prévues dans la plupart des régions, de feux de forêts, d'invasions ou d'extinctions d'espèces, de productivité des océans, de rendement agricole global, ou encore de perte plus limitée du permafrost, les sols gelés des hautes latitudes.

Ces risques seront moindres en particulier si l'on évite de dépasser 1,5° (au lieu de le dépasser pour ensuite faire baisser la température plus tard dans le siècle). Car se rapprocher d'un réchauffement de +2°C aurait des impacts irréversibles sur certaines espèces (plantes et vertébrés).

Blocages et négociations

Le rapport aligne plusieurs scénarios d'action possibles selon la rapidité du recul des énergies fossiles, avec des projections chiffrées sur la sortie du charbon qui n'ont pas manqué de faire bondir le trio minier Pologne, Australie et Japon.

Au bout de plusieurs heures, une solution, in fine plutôt osée, est venue lever le blocage: l'ajout de projections incluant aussi le pétrole et le gaz, une première dans un résumé du Giec, ont relaté des délégués sous couvert d'anonymat.

Les interventions ont été nombreuses. L'Arabie saoudite a notamment insisté sur les incertitudes scientifiques, selon des témoins. La délégation américaine, en revanche, emmenée par un haut fonctionnaire vétéran des négociations climatiques, a été décrite comme généralement "plutôt constructive".

Selon plusieurs participants, l'Arabie saoudite, premier exportateur mondial de pétrole, contestait un chapitre faisant référence aux engagements pris à Paris par les Etats pour réduire leurs émissions et soulignant leur insuffisance globale si le monde veut rester à 1,5°C.

"Finalement l'Arabie saoudite a levé son blocage, parce que cela était sur le point de s'achever par une note en bas de page", a indiqué un observateur requérant l'anonymat. Cela aurait voulu dire que le rapport mentionnerait officiellement que ce pays s'opposait au consensus scientifique et diplomatique.

Grande étape avant la COP 24

"Nous nous attendions à des négociations difficiles, et nous sommes heureux de voir que les gouvernements ont fait preuve d'une vraie réflexion sur les éléments scientifiques", a réagi en fin de réunion Stephen Cornelius, conseiller principal climat pour le WWF.

"Les engagements actuels des pays pour réduire les émissions ne suffiront pas à limiter le réchauffement à 1,5°C, vous ne pouvez pas négocier avec la science", a-t-il ajouté.

La prochaine grande étape de la lutte internationale contre le changement climatique aura lieu le 3 décembre en Pologne, avec la COP 24. Les Etats devront notamment trouver des moyens concrets pour respecter leurs engagements pris en 2015. Des engagements pourtant déjà insuffisants. Mais il faut bien commencer quelque part.

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