La ville de Bordeaux a rendu un rapport sur sa politique en matière de développement durable sur les années 2017 / 2018. Daniel Delestre, président de la Sepanso Gironde, déplore une accumulation de micro-actions, sans cohérence d’ensemble…
Le rapport foisonnant de la ville de Bordeaux sur ses efforts en matière de développement durable sur 2017 et 2018 a été présenté en conseil municipal ce lundi. « Il y a des milliers de mesures, des centaines de chiffres mais on n’a pas de vision politique globale », regrette Daniel Delestre, président de la Sepanso (fédération régionale des associations de protection de la nature) Gironde.
Pour lui ce rapport, imposé aux métropoles de plus de 50.000 habitants depuis 2011, jette de la poudre aux yeux sans prendre la mesure de la transition énergétique à mener.
Un empiétement sur les espaces naturels
« Je fais partie du comité départemental d’évaluation des risques naturels et technologiques et, je constate qu’on examine les projets d’urbanisation à coups de 12 hectares quand ils en comptent plusieurs centaines, sans vision d’ensemble », fait-il valoir. A son sens, les plans d’aménagements urbains provoquent des ruptures dans les continuités écologiques, comme le projet d’aéroparc autour de l’aéroport de Mérignac qui menace 2.500 hectares de zones humides et riches ou encore le projet de golf immobilier validé à Villenave d'Ornon.
Et cette urbanisation galopante de la métropole bordelaise ne ménage pas suffisamment, selon lui, des espaces verts permettant de lutter contre les îlots de chaleur en ville, alors que le réchauffement climatique s’accélère. « On a bien vu cet été, lorsqu’il a fait 36 °C pendant plusieurs semaines, qu’il manquait des fontaines, des arbres et des revêtements de couleur claire, sur le modèle des pays chauds », pointe ce défenseur de l’environnement. Ces investissements devraient être une priorité des architectes et des aménageurs pour être adapté à l’évolution du climat, que le rapport du climatologue Hervé le Treut nous annonce proche de celui de l’Andalousie pour 2050.
Le rapport pointe que 1.000 arbres sont plantés par an sur Bordeaux, avec des essences beaucoup plus variées qu’à une époque. « Mais ce ne sont pas des arbrisseaux qui vont nous protéger de la chaleur, s’agace Daniel Delestre. La diversité, pourquoi pas, mais il faut surtout garder les cultures locales ». A ce titre, les 17 marronniers de la place Gambetta, âgés de 70 ans, qui vont être abattus prochainement cristallisent beaucoup d’inquiétudes.
Une dégradation de la qualité de l’air
On est assez étonnés de lire dans le rapport qui concerne la qualité de l’air : « La comparaison globale des indices avec ceux des années antérieures montre que le bilan 2017 est globalement bon au regard des bilans annuels constatés depuis 2012. Le nombre de jours d’indices mauvais à très mauvais est toutefois le plus élevé depuis 2013 ». La situation semble bien se dégrader alors même que le rapport reprend aussi une enquête Cerema de 2017 qui montre que 27 % des déplacements se font en véhicules motorisés, contre 39 % en 2009 car la population métropolitaine croît.
La Sepanso salue la fermeture du pont de pierre aux voitures, les efforts pour encourager la pratique du vélo mais estime que certains autres positionnements du maire de la ville, Alain Juppé, rentrent en contradiction avec ces mesures. Le grand contournement routier de Bordeaux, qu' Alain Juppé envisage d’étudier, ressort régulièrement dans les débats sur la mobilité, et supposerait d’empiéter sur 1.500 hectares d’espaces naturels et ne ferait qu’encourager la circulation automobile.
Le rapport évoque aussi une campagne de mesures de l’ATMO en décembre 2017 au Jardin Botanique qui montre que 37 molécules de pesticides utilisés en agriculture, sur les 66 recherchées, ont été détectées dans l’air.
« La formule même de développement durable est antinomique, conclut Daniel Delestre. Sur une planète finie, avec des ressources finies et une population qui augmente on ne peut pas faire une croissance durable, on part sur de mauvaises bases ».